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Nous ne mangeons pas des nutriments, mais des aliments !

La recherche nutritionnelle se concentre traditionnellement sur la relation entre les nutriments individuels (comme les protéines, les acides gras saturés, le calcium,…) et la santé. Mais la recherche scientifique s’oriente de plus en plus vers les effets santé des aliments dans leur totalité. La composition nutritionnelle ne fait pas tout, elle ne rend pas compte pleinement du lien entre aliments et santé. Le fromage en est un bel exemple: il s’est avéré que sa consommation n’augmente pas le risque de maladies cardio-vasculaires qui pourrait être attendu sur base de sa teneur en acides gras saturés et en sel. Il n’y a rien d’étonnant à cela: nous ne consommons pas des ‘acides gras saturés’ et du ‘sel’, mais un produit, le ‘fromage’. Les chercheurs décrivent ceci comme l’effet ‘matrice’, reconnaissant que les effets santé des aliments sont beaucoup plus complexes et profonds que ceux des nutriments qu’ils contiennent.

Nous ne mangeons pas des nutriments, mais des aliments !

Qu’est-ce qui détermine l’effet matrice des produits laitiers?

 

Tout d’abord, il est important de comprendre que le lait et les produits laitiers sont des aliments riches en nutriments et ont une composition nutritionnelle complexe. Ils sont non seulement une source importante de protéines de haute valeur nutritive, de calcium, de potassium, d’iode, de vitamines B2 et B12 et de beaucoup d’autres vitamines et minéraux mais ils contiennent aussi des peptides bioactifs, des molécules qui exercent un effet positif sur la santé. Enfin, leur composition nutritionnelle complexe ressort aussi du fait qu’ils contiennent plus de 400 acides gras différents aux propriétés variées. A côté du fonctionnement individuel de chacun de ces composants, de nombreuses interactions complexes entre eux sont possibles. En effet, un aliment est plus que la somme de ses nutriments, ce que les scientifiques appellent l’effet matrice.

 

Cette matrice est aussi déterminée par des structures physiques et par conséquent par la façon dont les composés sont structurés dans l’aliment/le produit alimentaire. Ceci peut même différer de produit laitier à produit laitier: il suffit de penser à la structure ferme du fromage ou à la structure gélatineuse du yaourt par rapport au lait liquide. Ceci signifie également que l’enrichissement d’un aliment (par ex. en calcium) n’offre pas de garantie d’obtenir les mêmes effets de ce nutriment dans leur aliment naturel (par ex. le produit laitier). Ou comme le Conseil supérieur de la Santé le dit pour les jus végétaux enrichis à base de soja en comparaison avec le lait: “Cependant, une similarité nutritionnelle n’implique pas les mêmes effets sur la santé”.

 

Enfin, les méthodes de production variées et/ou les traitements effectués peuvent aussi avoir un impact sur la matrice du produit laitier.

 

 

 

 

 

Comment la matrice influence-t-elle l’effet santé des produits laitiers?

 

De manière générale, la matrice d’un aliment peut influencer notamment les effets physiologiques, comme la digestion et l’absorption, et donc l’effet santé général de l’aliment.

 

En raison de leur teneur en matière grasse, les produits laitiers sont souvent  considérés comme une cause de maladies cardio-vasculaires. Un panel international constitué de 18 experts, réunis spécifiquement pour discuter l’effet ‘matrice’, a cependant conclu que ceci n’est pas prouvé actuellement. Mieux encore, on constate généralement que la consommation de produits laitiers fermentés comme le fromage et le yaourt est associée à un moindre risque d’accidents vasculaires cérébraux, de maladies coronariennes et de diabète de type 2. C’est ainsi, par exemple, que l’effet du fromage sur les maladies cardio-vasculaires (et plus particulièrement l’effet sur la teneur en cholestérol sanguin) est moindre que ce qui pourrait être attendu sur base de sa teneur en acides gras saturés. Ceci suggère en effet une interaction complexe entre différents composants. Dans le cas du fromage, on pense à une interaction entre le calcium, le phosphore et les acides gras à chaîne courte (à savoir des composants générés durant le processus de fermentation). Pareille interaction pourrait limiter entre autres l’absorption de graisses.

 

L’effet santé du lait et des produits laitiers sur la santé osseuse s’avère aussi supérieur à ce qui pourrait être attendu sur base du simple effet de la présence de calcium. Des interactions positives entre le calcium, les protéines et le phosphore, non seulement entre eux mais aussi avec le lactose et les peptides bioactifs, peuvent expliquer les bienfaits du lait pour la santé osseuse.

 

 

 

 

 

 

De plus amples études

 

Il est absolument nécessaire de poursuivre les recherches sur les effets santé de la matrice du lait et de déchiffrer les mécanismes sous-jacents. Le concept d’effet matrice souligne l’importance de l’évaluation des effets santé au niveau des aliments dans leur totalité, plutôt qu’au niveau de leurs nutriments individuels. Le Conseil supérieur de la Santé belge a reconnu ce principe, en publiant ses dernières recommandations sous la forme de ‘Food based dietary guidelines’.

 

 

 

 

 

 

Téléchargez ici l'infographie sur l'effet de matrice !

 

 

 

 

 

 

 

Bronnen

[1] Chen GC et al. Cheese consumption and risk of cardiovascular disease: a meta-analysis of prospective studies. Eur J Nutr. 2016 Aug 12; DOI: 10.1007/s00394-016-1292-z.

[2] Thorning TK et al. Whole dairy matrix or single nutrients in assessment of health effects: current evidence and knowledge gaps. Am J Clin Nutr 2017: 105:1–13. http://dx.doi.org/10.3945/ajcn.116.151548

[3] Muehlhoff et al. Milk and dairy products in human nutrition. Rome: Food and Agriculture Organisation of the United Nations; 2013. http://www.fao.org/docrep/018/i3396e/i3396e.pdf (raadpleging 05/2020).

[4] Recommandations alimentaires pour la population belge adulte axées sur les aliments - 2019 https://www.health.belgium.be/fr/avis-9284-fbdg-2019

[5] Thorning TK et al. Whole dairy matrix or single nutrients in assessment of health effects: current evidence and knowledge gaps. Am J Clin Nutr 2017: 105:1–13. http://dx.doi.org/10.3945/ajcn.116.151548

[6] Recommandations alimentaires pour la population belge adulte axées sur les aliments - 2019 https://www.health.belgium.be/fr/avis-9284-fbdg-2019